Une nouvelle recherche remet en cause un mythe qui persiste depuis pratiquement 40 ans et qui stipule que le fait de faire de la compétition en sport d’endurance, comme par un exemple des marathons, affaiblirait le système immunitaire du corps et rendrait les compétiteurs plus fragiles face aux infections.
Une recherche des années 1980, qui s’était focalisée sur des événements comme le marathon de Los Angeles, avait demandé aux compétiteurs s’ils avaient des symptômes d’infections les jours ou les semaines qui suivaient leur course. Nombreux sont ceux qui avaient répondu positivement, ce qui a conduit à la croyance fort répandue que les sports d’endurance augmentaient le risque d’infection en affaiblissant le système immunitaire.
Cependant, un nouvel article de chercheurs du Département de la Santé de l’Université de Bath publié dans le journal Frontiers in Immunology [1], réinterprète les résultats scientifiques de ces dernières décennies et met l’accent sur le fait que l’exercice, au lieu d’affaiblir le système immunitaire, pourrait au contraire lui être bénéfique.
Dans une analyse détaillée des articles de recherche qui ont été publiés depuis les années 1980, cette nouvelle revue de la littérature a réinterprété les résultats, à partir des principes fondamentaux de l’immunologie et de la physiologie de l’exercice, pour clarifier des incompréhensions et des mauvaises interprétations qui se sont formées avec les années.
Dans leur étude, les auteurs expliquent que pour les sportifs qui prennent part à des compétitions de sports d’endurance, l’exercice provoque des changements dans les cellules immunitaires de deux façons. D’abord pendant l’exercice le nombre de cellules immunitaires dans le flux sanguin peut augmenter de façon importante jusqu’à 10 fois, notamment les “cellules tueuses naturelles” qui traitent les infections. Après l’exercice, certaines cellules dans le sang diminuent substantiellement, en tombant parfois à des niveaux plus bas qu’avant le début de l’exercice, et cela peut durer plusieurs heures.
De nombreux scientifiques avaient auparavant interprété cette réduction des cellules immunitaires après l’exercice comme étant un affaiblissement immunitaire. Cependant, des preuves solides montrent que cela ne signifie pas que les cellules ont été “perdues” ni “détruites”, mais plutôt qu’elles se sont déplacées vers d’autres régions du corps qui sont plus susceptibles d’être infectées, comme les poumons.
Les scientifiques savent que ces cellules ne sont pas “détruites” pour trois raisons principales. Premièrement, la plupart des preuves montrent que les cellules reviennent à leurs niveaux normaux dans les quelques heures qui suivent, ce qui est beaucoup trop rapide pour qu’elles soient “remplacées” par de nouvelles cellules. Deuxièmement, des études sur les êtres humains ont montré que ces cellules ont la capacité de quitter le flux sanguin et de voyager vers d’autres parties du corps.
Troisièmement, des études en laboratoire sur des animaux ont montré, en marquant les cellules immunitaires, qu’après l’exercice ces cellules marquées s’accumulent dans les poumons, et dans d’autres parties du corps, car elles vont là-bas à la recherche d’infections.
Les auteurs montrent donc que le faible nombre de cellules immunitaires dans le sang dans les heures qui suivent l’exercice, loin d’être un signe de suppression immunitaire, sont en fait un signal que ces cellules, amorcées par l’exercice, travaillent dans d’autres régions du corps.
Le Dr John Campbell, l’un des auteurs de l’étude, explique : “il est de plus en plus clair que les changements qui s’opèrent dans le système immunitaire après une séance de sport épuisante ne provoquent pas de suppression ni d’affaiblissement immunitaire. En fait, les preuves montrent que votre système immunitaire est stimulé après le sport, nous savons par exemple que l’exercice peut améliorer votre réaction immunitaire face à un vaccin contre la grippe.”
Les scientifiques ajoutent : “étant donné le rôle important de l’exercice pour ce qui est de réduire le risque de maladie cardiovasculaire, de cancer et de diabète de type 2, les résultats de notre analyse mettent l’accent sur le fait que les gens ne devraient pas abandonner l’exercice par crainte que cela réduise leur système immunitaire. Il est clair que les bénéfices de l’exercice, y compris des sports d’endurance, outrepassent largement les effets négatifs que les gens pourraient percevoir.”
Bien qu’une séance d’exercice épuisante en soi ne vas pas augmenter la probabilité d’avoir une infection, d’autres facteurs peuvent en être la cause.
D’abord, le fait de participer à un événement sportif où il y a un rassemblement de nombreuses personnes augmente les probabilités d’être contaminé par une infection. Ensuite, les transports publics, notamment les avions sur lingue distance, où le cycle du sommeil est perturbé, peuvent aussi augmenter votre risque d’infection. D’autres facteurs comme le fait d’avoir une alimentation inappropriée, le froid, l’humidité et le stress psychologique, ont tous été associés à une probabilité plus importante de développer des infections.
Références :
[1] Debunking the Myth of Exercise-Induced Immune Suppression : Redefining the Impact of Exercise on Immunological Health Across the Lifespan. Front. Immunol., 2018.