Deux études, une sur des souris [1] et l’autre sur des êtres humains [2], apportent des preuves définitives que l’exercice seul, indépendamment de l’alimentation, peut modifier la composition des microbes dans l’intestin. Ces études ont été conçues pour isoler les changements induits par l’exercice des autres facteurs comme l’alimentation ou l’utilisation d’antibiotiques, qui pourraient altérer le microbiote intestinal.
Dans la première étude, les scientifiques ont transplanté du matériel fécal de souris qui avaient fait de l’exercice ou de souris sédentaires dans les colons de souris sédentaires qui n’avaient pas de germes, qui avaient été élevées dans un environnement stérile et n’avaient donc pas de microbiote qui leur était propre. Dans la seconde étude, l’équipe de recherche a suivi les changements dans la composition du microbiote intestinal chez des participants humains en même temps qu’ils passaient d’un style de vie sédentaire à un style de vie plus actif, et vice-versa.
“Ces études montrent que l’exercice peut avoir un effet sur les intestins indépendamment de l’alimentation ou d’autres facteurs,” explique Jeffrey Woods de l’Université de l’Illinois et auteur de cette étude. Dans l’étude sur les souris, les changements du microbiote des souris destinataires reflétaient ceux des souris donneuses, avec des différences claires entre celles qui ont reçu les microbes des souris qui faisaient de l’exercice de celles qui étaient sédentaires. Ce qui prouve que les transplantations ont fonctionné.
Les destinataires du microbiote des souris faisant de l’exercice avaient une proportion plus élevée de microbes qui produisent du butyrate, un acide gras à chaine courte qui favorise les cellules intestinales saines, réduit l’inflammation et génère de l’énergie pour l’hôte. Elles semblaient aussi être plus résistantes à la colite ulcéreuse expérimentale qui est une maladie inflammatoire de l’intestin.
“Nous avons trouvé que les animaux qui ont reçu le microbiote des souris actives avaient une réponse atténuée aux éléments chimiques induisant la colite,” dit Allen. “Il y avait une réduction de l’inflammation et une augmentation des molécules régénératrices qui favorisent une récupération plus rapide.”
Dans l’étude sur les êtres humains, l’équipe de recherche a recruté 18 adultes minces et 14 obèses tous sédentaires, a prélevé des échantillons de leur microbiome intestinal et leur a fait suivre un programme pendant lequel ils devaient faire de l’exercice cardiovasculaire supervisé pendant 30 à 60 minutes trois fois par semaine pendant six semaines. Les chercheurs ont ensuite de nouveau prélevé des échantillons du microbiome des sujets à la fin de leur période d’exercices de six semaines, et encore six semaines plus tard alors qu’ils étaient redevenus sédentaires. Les participants devaient garder leur alimentation habituelle sur toute la durée de l’étude.
Les concentrations fécales en acides gras à chaine courte, et notamment de butyrate, ont augmenté dans l’intestin humain comme conséquence de l’exercice. Ces niveaux ont de nouveau baissé après que les participants soient revenus à un style de vie sédentaire. Les tests génétiques sur les microbiotes ont confirmé que cela correspondait aux changements dans la proportion de microbes qui produisent le butyrate et les autres acides gras à chaine courte.
Les augmentations les plus importantes ont été vues chez les participants minces, qui avaient des niveaux significativement plus bas de microbes produisant les acides gras à chaine courte dans leurs intestins au départ. Les participants obèses n’ont affiché que des modestes augmentations dans la proportion de microbes producteurs d’acides gras à chaine courte. Les ratios des différents microbes dans l’intestin différaient aussi entre les personnes minces et obèses à chaque étape de l’étude.
“Tout ceci pour dire qu’il y a des différences nettes dans la façon dont le microbiome de quelqu’un qui est obèse réagit à l’exercice par rapport à quelqu’un de mince,” disent les chercheurs. “Mais il faudra plus de recherches pour déterminer pourquoi il en est ainsi.”
Références :
[1] J. M. Allen, L. J. Mailing, J. Cohrs, C. Salmonson, J. D. Fryer, V. Nehra, V. L. Hale, P. Kashyap, B. A. White, J. A. Woods. Exercise training-induced modification of the gut microbiota persists after microbiota colonization and attenuates the response to chemically-induced colitis in gnotobiotic mice. Gut Microbes, 2017.
[2] Jacob M. Allen, Lucy J. Mailing, Grace M. Niemiro, Rachel Moore, Mark D. Cook, Bryan A. White, Hannah D. Holscher, Jeffrey A. Woods. Exercise Alters Gut Microbiota Composition and Function in Lean and Obese Humans. Medicine & Science in Sports & Exercise, 2017.