Il est ironique de constater que, contrairement à leur objectif principal, la plupart des magasins de sport, de diététique ou les parapharmacies voient leurs rayons garnis de produits qui ne sont pas bons à la santé, des potions aux plantes dont la pureté est inconnue, aux compléments alimentaires qui capitalisent sur la perte de poids ou la repousse des cheveux.
Deux études remettent en question un argument de longue date des vendeurs de compléments alimentaires pour le sport, que sont les suppléments de protéines, habituellement vendus sous la forme d’une poudre, avec des noms résonnant la stimulation de testostérone tels que Muscle Max 500 ou Mega Monster Mass.
De tels suppléments sont des best sellers. Mais un corps d’étude croissant montre que vous n’avez pas besoin de supplémentation en protéines, à moins d’être un athlète de niveau professionnel suivant un entrainement intense, ou peut-être gravement malade suite à une famine ou à une tuberculose, et même dans ces cas, le besoin serait à traiter au cas par cas.
Les dernières études mettent en lumière le fait que la seule chose que vous faites dans ce cas est de gaspiller votre argent. Vous n’en tirerez que peu de bénéfices, et au lieu de cela, vous vous mettez en danger pour ce qui est des problèmes rénaux, aux os et au cœur.
Faire les calculs
Les chercheurs en médecine ont informé le public sur les suppléments de protéines depuis des années. Mais beaucoup d’entraineurs continuent à les proposer à des athlètes amateurs parce qu’ils n’ont rien d’autre de mieux à proposer, ou ne se renseignent pas sur le sujet.
Vous avez certes besoin d’un complément de protéines quand vous faites du sport, particulièrement quand vous essayez de construire du muscle via l’haltérophilie ou d’autres formes de musculation. Le processus de construction du muscle implique de causer des dégâts aux fibres musculaires, puis de les reconstruire, et ceci nécessite plus de protéines.
Pourtant, même dans ce cas et à moins que vous soyez dans la catégorie de M. Univers (avec les produits dopants adéquats), votre régime alimentaire vous apporte toutes les protéines dont vous avez besoin.
Le calcul est simple. Quand on s’entraine, on a besoin d’environ un gramme de protéine par kilo de poids de corps par jour. Ainsi, un individu qui pèse 80 kg aura besoin de 80 grammes environ de protéines par jour. Cela représente la quantité de protéines dans un bol de lait ou un yaourt au petit-déjeuner (8-12 grammes), une boite de thon au déjeuner (40 g) et un steak de 170 grammes au dîner (40 grammes).
La viande est généreuse en protéines, avec 6 à 10 grammes pour 30 grammes de produit (environ 20 à 22%). Mais les végétariens peuvent aussi avoir leur compte de protéines à partir des légumes, même s’ils s’entrainent dur.
Les experts de la Whey
Une étude publiée dans le journal Nutrition [1] a sondé plus de 1000 adultes dans 50 salles de sport, et a trouvé que presque la moitié des hommes prenaient des compléments alimentaires, avec les protéines largement en tête, et tout cela sans aucune supervision.
Pourtant, les chercheurs ont conclu qu’aucun d’eux n’avait besoin de protéines.
Dans la même veine, une plus petite étude [2], thèse de Martin Fréchette de l’Université de Montréal, a examiné les régimes des athlètes d’élite, faisant partie de l’Etude du Centre de Nutrition du Sport Canadien. Plus de 90% de ces athlètes prenaient des compléments alimentaires, sur la recommandation des entraineurs ou des amis ; seuls 25% pouvaient expliquer pourquoi ils en prenaient ; et parmi ceux qui utilisaient les suppléments de protéines, plus de 80% avaient déjà suffisamment de protéines apportées par leur régime alimentaire normal.
Le plus inquiétant est comment l’habitude de consommer des protéines débute.
Une étude de 2008, publiée dans le Journal of Strength and Conditioning Research [3], a montré comment les suppléments de protéines étaient fréquents chez les athlètes américains des Universités, qui prennent le produit largement sur la recommandation des coaches et amis avec la croyance erronée que protéines = force.
Faux carburant
Peu de gens souffrent d’une carence en protéines dans les pays Occidentaux. Les personnes ne faisant pas de sport ont besoin, en moyenne, d’environ 60 grammes par jour. Ceux qui ajoutent des protéines de petit lait (whey), d’oeufs ou de soja à leur régime ne font qu’ajouter des calories sans impact sur la croissance musculaire.
Aucune étude n’a identifié, à ce jour, les problèmes à court terme sur la santé d’un excès de protéines, mais cela a été associé à des insuffisances rénales, à de l’ostéoporose et à des maladies cardiovasculaires. La raison en est que les protéines non utilisées passent à travers le sang, se décomposent dans l’urée et en sous-produits acides. Ces sous-produits fatiguent les reins quand ils sont filtrés, et déclenchent une libération du calcium par les os. Des études récentes révèlent comment les protéines causent des inflammations, et augmentent les risques d’obstruction les artères.
Certaines poudres de protéines, à savoir celles avec des éclairs de foudre sur l’étiquette, contiennent plus de 100 grammes de protéines par dose. Cette protéine seule représente 400 calories, mais habituellement d’autres ingrédients élèvent ce total pour atteindre pratiquement les 1000 calories. Vous aurez réellement besoin d’un entrainement d’enfer pour métaboliser tout ça !
Certains bodybuilders sentent qu’ils ont besoin de 2 grammes de protéines par kilos de poids de corps ; cela dépendant de l’intensité de leur entrainement. Si vous utilisez un supplément, alors le mieux est de le prendre juste après l’entrainement, ainsi les muscles endommagés pourront utiliser cette protéine pour se réparer.
A noter cependant, que malgré le mot “fuel” (carburant) qu’on peut trouver sur de nombreuses boites de protéines, vos muscles ne brulent pas de protéines, à moins d’être en mode famine. Mais si vous avez le luxe d’appartenir à une salle de sport et d’y passer votre temps libre, vous n’êtes pas supposé être affamé.
Références :
[1] Intake of nutritional supplements among people exercising in gyms and influencing factors. Nutrition
[2] Utilisation des suppléments alimentaires chez les athlètes d’élite québécois, Fréchette, Martin
[3] Protein Supplement Users Among High School Athletes Have Misconceptions About Effectiveness. Journal of Strength and Conditioning Research, Jui 2008, Vol. 22, Iss. 4, pp 1124-1129