Faut-il enregistrer l’utilisation de l’oxygène ou bien les calories brûlées ?

L’analogie habituellement utilisée pour expliquer l’économie de la course est que cela ressemble à l’économie de carburant d’une voiture – il s’agit d’une mesure de la quantité de carburant consommée pour voyager sur une certaine distance. Mais de quel “carburant” parle-t-on ici ? C’est la question à laquelle se sont attelés des chercheurs de l’Institut Anglais du Sport de l’Université de Loughborough, dont l’étude a été publiée dans le journal Medicine & Science in Sports & Exercise [1].

Il y a deux options de base pour exprimer l’économie de course. On peut poser la question “de combien d’oxygène ai-je besoin pour alimenter mes muscles afin de courir un kilomètre ?” Ou alors on peut aussi se demander “combien de calories ai-je besoin de brûler pour courir un kilomètre ?” En théorie, la réponse à ces deux questions devrait être interchangeable, parce que la quantité d’oxygène que nos muscles consomment est utilisée dans la réaction qui transforme les calories de l’énergie des aliments en mouvement. Mais en pratique, cela peut ne pas être vrai. Cette nouvelle étude a utilisé des données provenant de 172 coureurs de haut niveau qui ont été testés en laboratoire durant ces dix dernières années, et où leur économie de course a été mesurée à dix vitesses différentes sous leur seuil de lactate. Voici ce qu’ont montré les données :


Les légendes ne sont pas faciles à lire (et sont en anglais), mais le graphique du dessus (Energy cost) montre le nombre de calories brûlées par kilomètre. On peut voir qu’il augmente régulièrement : plus on court vite et plus on brûle de calories pour couvrir une distance donnée. Le second graphique au milieu (oxygen cost) montre la dépense d’oxygène par kilomètre, et il reste plutôt stable à n’importe quelle vitesse. Pourquoi cette différence ? Le troisième graphique, celui du dessous, appelé le “ratio d’échange respiratoire”, reflète le ratio d’hydrates de carbone brûlés sur les graisses pour fournir de l’énergie. Il montre que quand vous accélérez, vous brûlez une plus grande proportion de sucres. Étant donné que vous tirez plus d’énergie par unité d’oxygène à partir des sucres qu’à partir de la graisse, ceci explique pourquoi les vitesses les plus élevées sont capables de brûler plus de calories sans utiliser plus d’oxygène.

Quel enseignement pratique peut-on en tirer ? Que le fait d’exprimer l’économie de course en termes d’utilisation de l’oxygène (qui est la pratique standard habituelle) masque les modifications d’utilisation de l’énergie qui surviennent quand vous accélérez ou ralentissez. De plus, quand vous utilisez les calories au lieu de l’oxygène, il est clair que l’économie de course n’est pas indépendante de la vitesse. Car contrairement à la croyance populaire, vous brûlez réellement plus de calories quand vous forcez plus (bien que la différence n’était que de 3, 4% selon les différentes vitesses utilisées dans cette étude).

L’autre question de cette étude est : est-ce que l’économie de course globale est directement proportionnelle au poids du corps ? C’est-à-dire est-ce qu’on pourrait s’attendre à ce que quelqu’un qui pèse 10% de plus consomme 10% d’énergie en plus pendant qu’il ou elle court ? Ceci fait l’objet d’un débat de longue date, avec certaines données qui montrent que l’économie de course obéit effectivement à une sorte de loi de puissance allométrique, comme l’économie proportionnelle au poids à la puissance de 0,75. Dans ce cas, parmi une population homogène de coureurs de distance bien entrainés, la relation était presque parfaitement linéaire : l’économie était directement proportionnelle à la taille. Ceci pourrait permettre à quiconque qui s’y intéresse de calculer combien de calories supplémentaires brûle un athlète de 70 kg par rapport à un de 65 kg sur 10000 mètres.

Références :

[1] Med Sci Sports Exerc. 2014 Feb 19. The Valid Measurement of Running Economy in Runners. Shaw AJ, Ingham SA, Folland JP.

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