La caféine et les glucides sont les deux stimulants de la performance les plus fiables. Alors, que se passe-t-il quand vous les associez ? C’est ce que des chercheurs de Taiwan ont cherché à savoir dans une étude publiée dans l’European Journal of Applied Physiology [1], et dont les résultats étaient pour le moins… surprenants ! Ils ont testé les effets de 6 mg d’hydrates de carbone par kilo de poids de corps pris 10 minutes avant de faire de l’exercice, en utilisant un protocole de sprint (10 séries de 5 sprints courts de 4 secondes chacun sur un vélo stationnaire, entrecoupés d’un temps de récupération de 20 secondes entre chaque sprint et de 2 mn entre chaque série).
Voici les pics de puissance qu’ils ont développés pour chaque série :
Vous avez bien vu, il ne semble pas y avoir de différence que les athlètes prennent de la caféine seule (CAF+PLA), de la caféine avec des glucides (CAF+CHO), des glucides seuls (PLA+CHO), ou juste un placébo (PLA+PLA). Il en est de même pour les autres mesures comme la puissance moyenne ou le travail total développé. Alors que s’est-il passé ?
Pour ce qui concerne les glucides, c’est très simple. Contrairement à la plupart des études standards sur les glucides et l’exercice, les 12 sujets ont reçu un repas normalisé (500 calories dont 65% d’hydrates de carbone) deux heures avant l’exercice – ainsi, leurs muscles étaient déjà relativement chargés en hydrates de carbone. Pour un marathon, les coureurs pourraient profiter d’un apport supplémentaire en glucides, mais pour ce protocole de 60 minutes composé de courts sprints répétés (conçu pour imiter les sports d’équipe qui exigent des sprints de ce genre comme au football, au hockey ou au basketball), il n’y avait tout simplement pas assez de temps pour qu’ils se vident de leur glucides. Pour de nombreux athlètes, c’est une approximation proche de celle de la vraie vie : dans les sports d’équipe du moins, il est rare que vous fassiez un match après une nuit à jeun sans avoir mangé quelque chose.
Cela ne veut pas dire que les glucides “ne marchent pas”, d’autres types d’exercices (i.e. des efforts soutenus comme la course à pieds ou le vélo) pourraient exiger plus d’hydrates de carbone puisés dans les stocks. Mais c’est un rappel du fait que les généreux résultats obtenus dans certaines études en laboratoire ne se traduisent pas toujours dans les conditions de la vraie vie. Dans la plupart des cas, pour ce qui concerne les exercices qui durent une heure ou moins, les glucides ne sont pas susceptibles de jouer un rôle important dans la performance si on ne jeûne pas.
Les résultats avec la caféine sont plus difficiles à expliquer. Les auteurs suggèrent que ce pourrait être à cause du protocole spécifique de sprints et de récupération, étant donné que les améliorations ont été observées avec des efforts soutenus, tout comme avec des temps de récupération plus longs entre chaque courte accélération. Ils ont aussi découvert que la caféine semblait élever les niveaux de cortisol quand elle était associée aux glucides, bien que ces résultats soient plus difficiles à interpréter. La variable clé qui pourrait avoir causé cette absence de réaction pourrait en fait venir du protocole de sprints ultra-courts.
Enfin, un détail que l’étude ne mentionne pas, et qui peut avoir son importance, est de savoir si les sujets étaient des buveurs réguliers de café. Les chercheurs leur avaient demandé de s’abstenir de boire de la caféine sur la période de l’étude. Ainsi, s’ils étaient accros au café, ils peuvent avoir été stimulés après avoir pris de la caféine. D’un autre côté, s’ils ne buvaient habituellement pas de café, alors peut-être que les résultats apportent davantage d’eau au moulin à l’idée selon laquelle les effets apparents de stimulation de la performance de la caféine dans les études en laboratoire sont principalement une illusion causée par un effet d’abstinence (et donc une baisse conséquente de la performance) qui survient quand les sujets accros à la caféine reçoivent un placébo au lieu de caféine.
Références :
[1] Co-ingestion of caffeine and carbohydrate after meal does not improve performance at high-intensity intermittent sprints with short recovery times. Lee CL, Cheng CF, Lee CJ, Kuo YH, Chang WD. Eur J Appl Physiol. 2014 Avr. 20.