Les calories représentent l’information nutritionnelle la plus basique en nutrition. Elles se retrouvent sur toute boite de céréales. Mais des éléments de preuve scientifique récents laissent entendre que ces nombres pourraient ne pas vous dire tout ce que vous avez besoin de savoir.
Une étude du Département Américain de l’Agriculture, publiée dans l’American Journal of Clinical Nutrition [1], indique que le décompte commun des calories des fruits à coque, comme les pistaches et les amandes, est imprécis, et les scientifiques déclarent que cela peut aussi être vrai pour les autres aliments. Une autre étude suggère que l’effet rassasiant des calories pourrait être plus mental que chimique.
Les calories ne sont pas seulement des calories, explique Rick Mattes, professeur d’alimentation et de nutrition à l’Université de Purdue. Ce sont plus que de simples nombres.
Exploser votre alimentation
Une calorie est une mesure de la chaleur, qui est un concept qui a vu le jour au 19° siècle avec Nicolas Clément en 1824. Le terme de “calorie”, quand il n’est pas utilisé dans le cadre de l’alimentation, fait habituellement référence à la quantité de chaleur nécessaire pour augmenter la température d’un kilogramme d’eau d’un degré Celsius. Le scientifique américain Wilbur Atwater a ensuite utilisé les calories comme unité pour mesurer l’énergie dans l’alimentation dans les années 1890.
Les mesures des calories sont réalisées dans une “bombe à calories” ou “bombe calorimétrique” développée par le scientifique Antoine Lavoisier en 1790. Une petite portion de la nourriture qu’on désire mesurer est placée dans un appareil qui ressemble à une cocotte-minute. De l’oxygène est pompée dans la bombe et la nourriture est enflammée. Des thermomètres mesurent alors la chaleur libérée et les calories sont comptées.
On appelle ceci une “bombe calorimétrique” parce qu’on fait littéralement “exploser” la nourriture et que l’on capture la chaleur pour la mesurer. Les calories sont de la chaleur. Et tout ce qu’on fait est de mesurer en combien de chaleur s’est transformée la nourriture quand on la brûle. On ne fera pas “sauter” une pizza entière mais seulement un petit morceau, et on extrapole la mesure des calories à partir de cela.
Le fait que la boite de la pizza affirme que la pizza fait 800 calories ne signifie pas que votre corps va métaboliser 800 calories. Toute la nourriture n’est pas digérée. Ce qui n’est pas digéré est rejeté hors du corps en fèces et en urine. Une partie de la nourriture apporte l’énergie nécessaire pour manger et boire, comme pour le masticage ou la digestion par exemple. C’est ce qu’on appelle l’énergie métabolisable.
L’estimation de l’énergie métabolisable en alimentation devient compliquée. Cela implique des calculs mathématiques des protéines, des sucres et des graisses multipliés par des algorithmes développés par Atwater, d’ailleurs nommés les “facteurs d’Atwater”.
Mais les calculs pourraient ne pas donner des réponses correctes. Le laboratoire a par exemple découvert ces imprécisions quand il a mesuré les fruits à coque. Ils ont pris 18 volontaires et les ont nourris avec un régime alimentaire basique pendant 3 semaines. Après qu’ils se soient adaptés à cette forme d’alimentation – environ 10 jours – des fruits à coque ont été ajoutés à leur alimentation, et des échantillons de leurs fèces et d’urine ont été régulièrement prélevés.
En sachant quels aliments entraient et lesquels ressortaient, les chercheurs étaient capables de mesurer l’énergie métabolisable des fruits à coque individuels. Les nombres utilisés sur les emballages alimentaires sont l’énergie métabolisable utilisant les facteurs d’Atwater.
Ce que l’expérience de l’Université de Purdue a fait était de mesurer les calories non utilisées par opposition à l’opération qui consiste à faire des calculs. Bear a trouvé que le décompte habituel des calories donné pour les pistaches était probablement trop élevé, à environ 5% de plus que l’énergie réelle dans les fruits à coque. Les amandes étaient sous estimées d’environ 20%.
Le chercheur pense que la rupture survient à cause des fibres non digérables dans les parois cellulaires des noix qui piègent les graisses.
Les scientifiques savent depuis longtemps que la forme de la nourriture fait la différence. Les individus pensent que les aliments solides sont plus rassasiants que les liquides malgré le décompte des calories. Les chercheurs de Purdue voulaient vérifier cela.
“Nous pensons que notre faim chute moins et que votre satiété augmente moins quand nous pensons que nous allons ingérer un liquide dans nos corps plutôt qu’un élément solide” dit Mattes. Le mot le plus important ici était “pensons”.
Les scientifiques ont dit à 52 sujets qu’ils allaient boire une boisson aromatisée à la cerise, et qu’elle restera sous forme liquide dans leur corps. Le jour suivant, ils ont pris quelque-chose qui ressemblait à la substance précédente et ils ont montré aux sujets comment ajouter un élément chimique qui transformait immédiatement le liquide en solide. Les scientifiques ont raconté aux sujets que le même phénomène surviendrait dans leur estomac.
En réalité, ils ont tous bu le même liquide les deux fois, sans y avoir ajouté d’élément chimique du tout qui est resté liquide dans leurs corps. Les sujets ont seulement pensé qu’il deviendrait solide. On appelle cela de la “manipulation cognitive”.
Pourtant, les sujets ont rapporté qu’ils étaient moins rassasiés dans le premier cas, et plus rassasiés quand ils pensaient qu’il allait devenir solide. Le liquide est même allé plus rapidement à travers leur corps parce que la chimie du corps réagissait à la pensée qu’il s’agissait d’un liquide et que de ce fait ils absorbaient moins de calories.
“Notre environnement est tellement pollué par la nourriture de mauvaise qualité et par des portions trop importantes que la seule façon pour que les individus ne grossissent pas est de regarder consciencieusement ce qu’ils mangent” dit-il. “Et pour ce faire, il faut des chiffres, parce que même si vous avez un doctorat en nutrition, il est impossible de dire avec précision combien il y a de calories dans la plupart des aliments”.
Références :
[1] Am J Clin Nutr. 2012 Mar ;95(3):587-93. doi : 10.3945/ajcn.111.025437. Epub 2012 Jan 18.
Beverage consumption, appetite, and energy intake : what did you expect ? Cassady BA, Considine RV, Mattes RD.