Des chercheurs ont découvert que les gènes actifs dans la graisse abdominale d’un individu sont significativement différents de ceux de la graisse des cuisses/fessiers, découverte qui pourrait ouvrir une voie sur la façon dont nous appréhendons cette graisse abdominale indésirable.

Les hommes tendent à stocker plus de graisse dans la région du ventre, mais n’en ont habituellement pas trop sur les hanches ou les cuisses. D’un autre côté les femmes sont plus en forme de poire, stockant plus de graisse sur leurs hanches et cuisses que sur le ventre. Pourquoi les hommes et les femmes sont-ils si différents ?

La réponse n’est pas encore très claire, mais elle vaut la peine d’être étudiée, explique le Dr Steven Smith, de l’Institut de Recherche sur le Métabolisme et le Diabète. C’est parce que la graisse abdominale est associée à de plus grands risques de maladies cardiovasculaires et de diabète. D’un autre côté, la graisse des hanches et des cuisses ne semble pas jouer un rôle spécial dans ces états.

Dans une étude publiée dans le Journal of Clinical Endocrinology & Metabolism [1], Smith et ses collègues ont essayé d’expliquer cette différence en déterminant comment la graisse du ventre et des cuisses différait génétiquement. Cette recherche pourrait permettre de penser autrement la graisse dans le corps, plutôt que de se concentrer uniquement sur la façon d’expulser la graisse abdominale.

Gènes de graisse abdominale contre gènes de graisse des cuisses

Les chercheurs ont d’abord prélevé des échantillons de graisse d’hommes et de femmes. Puis, ils ont comparé les gènes les plus actifs dans la graisse du ventre avec ceux qui étaient les plus actifs dans la graisse des cuisses.

Ils ont trouvé que les gènes qui opèrent dans la graisse des cuisses d’une personne étaient très différents de ceux qui se trouvent dans leur graisse abdominale. Pour les hommes, 125 gènes s’expriment différemment dans la graisse du ventre que dans les cuisses. Pour les femmes, ce sont 218 gènes (la plupart étant unique aux femmes, mais 59 gènes sont les mêmes que ceux de la graisse masculine).

Les gènes les plus notables qui diffèrent sont connus comme étant les gènes homéoboites (homeobox). Ces gènes sont connus pour leur rôle dans le développement de la forme de l’embryon, déterminant quelles cellules et quels organes vont ici ou là. De nombreux gènes homéoboites sont influencés par des hormones comme les œstrogènes.

Pourquoi ces gènes homéoboites sont si importants pour la graisse ? “Nous pensons que ces gènes programment les cellules de graisse pour qu’elles répondent différemment aux différentes hormones et aux autres signaux” dit Smith. Les cellules souches montrent que la graisse est préprogrammée pour sa localisation dans le corps.

Dans le cadre de leurs travaux, Smith et son équipe ont aussi isolé des cellules souches de la graisse du ventre et des cuisses, et les ont cultivées en laboratoire. Ces cultures ont permis d’étudier des cellules de graisses qui n’étaient pas influencées par des nerfs, des hormones ou d’autres signaux externes.

Pourtant, les chercheurs ont retrouvé les mêmes différences de localisation spécifique de l’activité des gènes dans la graisse qui se sont développés à partir de ces cellules souches. Ces résultats leur montrent que les cellules sont préprogrammées. En d’autres termes, la graisse du ventre et la graisse des cuisses sont génétiquement destinées pour leur localisation finale pendant le développement. Ce n’est pas une différence qui s’acquiert avec le temps, comme résultant d’une alimentation ou d’une exposition environnementale.

Une nouvelle façon de penser la graisse

Médicalement parlant, dit Smith, il est important de comprendre ces différences et comment elles surviennent. “Même si de nombreuses femmes détestent avoir de larges hanches et de grosses cuisses, cette forme en poire réduit en fait leur risque de maladies cardiovasculaires et de diabète. En fait, les femmes qui ont des crises cardiaques tendent à avoir plus de graisse abdominale que de graisse sur les cuisses.”

Cette recherche marque une nouvelle façon de penser. “La plupart des gens veut stopper sa graisse sur le ventre. Mais le problème ne vient pas seulement de la graisse, c’est sa localisation. La graisse du ventre n’est qu’un marqueur du problème. Le vrai problème est dans l’incapacité de stocker cette graisse sur les hanches et les cuisses” dit-il.

Enfin, Smith espère que des études futures viseront à mieux comprendre les différences fondamentales entre ces dépôts graisseux, pouvant conduire vers des traitements spécifiques visant les régions qui contribuent à la plupart des complications de l’obésité.

Références :

[1] Distinct Developmental Signatures of Human Abdominal and Gluteal Subcutaneous Adipose Tissue Depots. JCEM , 2013 98 : 362-371.

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