Des cellules du système immunitaire pourraient permettre de réparer les muscles.
Le premier jour d’un retour à la salle de sport après un arrêt assez long a souvent pour conséquence l’apparition de courbatures assez douloureuses le lendemain, et surtout le surlendemain. Mais fort heureusement, les entrainements réguliers qui vont suivre seront généralement beaucoup moins douloureux.
Des scientifiques ont étudié ce phénomène de la réduction des courbatures pendant des dizaines d’années, ils ont même un nom pour le désigner : l’effet de la répétition. Malgré toutes ces années de recherche, les chercheurs ne sont toujours pas en mesure de décrire précisément pourquoi les gens ressentent moins de courbatures la seconde fois et les entrainements suivants. Ils savent notamment que le système immunitaire joue un rôle dans la façon dont les muscles se réparent eux-mêmes et se protègent contre des dommages supplémentaires. Mais des scientifiques ont apporté des preuves qui montrent la présence, pour le moins surprenante, de travailleurs immunitaires très spécifiques : les lymphocytes.
“On pense habituellement que les lymphocytes réagissent contre les infections, et pas qu’ils servent réparer les muscles, mais nous avons trouvé une accumulation importante de lymphocytes qui s’infiltraient dans les fibres musculaires endommagées,” explique Robert Hyldahl, un des auteurs de l’étude. “Notre étude montre la présence de lymphocytes dans les muscles humains en réponse aux dégâts causés par l’exercice physique.”
L’étude, publiée dans le journal Frontiers in Physiology [1] s’est développée à partir d’études passées qui impliquaient les cellules immunitaires dans la guérison des muscles. L’une de ces études, publiée en 2013, a montré que des lymphocytes étaient actifs dans les muscles de souris (mais pas d’êtres humains) après une blessure.
Pour leur étude, les chercheurs ont fait faire à 14 hommes et femmes deux programmes d’exercices vigoureux sur un dynamomètre isocinétique, séparés par 28 jours. Ils ont tous été très courbaturés, dit le chercheur. Avant et après chaque séance d’exercices, l’équipe a prélevé des biopsies de muscles sur les participants, puis a eu recours à l’immunohistochimie et à la microscopie pour analyser les tissus musculaires.
Le groupe de scientifiques a trouvé une augmentation inattendue de certains globules blancs après la seconde séance d’exercices, mais n’a identifié que les lymphocytes. “Jusqu’à très récemment, on ne pensait pas que les lymphocytes entraient dans les muscles en bonne santé,” explique Michael Deyhle, l’un des auteurs de l’étude. “Nous n’avions pas prévu de les mesurer parce qu’il n’existait pas de preuve montrant que les lymphocytes jouaient un rôle d’infiltration dans les tissus musculaires endommagés.”
La présence des lymphocytes suggère que les muscles deviennent plus efficaces pour ce qui est de recruter des cellules immunitaires après une seconde séance d’exercices, et que ces cellules pourraient faciliter et accélérer la réparation. En d’autres termes, les muscles semblent se souvenir des agressions préjudiciables pour réagir de la même façon que quand le système immunitaire réagit aux antigènes, toxines, bactéries ou virus.
Le groupe de recherche a aussi été surpris de voir que l’inflammation augmentait après la seconde session d’exercices. Les scientifiques, et de nombreux physiologistes, pensaient que l’inflammation apparaissait après la seconde séance d’exercices physiques, contribuant ainsi à cet effet de réduction des courbatures. Au lieu de cela, la réponse inflammatoire légèrement augmentée montre que l’inflammation elle-même n’aggrave probablement pas les dommages musculaires causés par l’exercice.
“De nombreuses personnes pensent que l’inflammation est une mauvaise chose,” dit Deyhle. “Mais nos données montrent que quand l’inflammation est correctement régulée, c’est un processus normal et sain que le corps utilise pour se soigner lui-même.” Les chercheurs d’ajouter : “certaines personnes prennent des médicaments anti-inflammatoires comme de l’ibuprofène et de l’aspirine après un entrainement, mais notre étude montre que cela pourrait être inutile. L’inflammation pourrait ne pas directement causer la douleur, étant donné que nous voyons que les courbatures musculaires diminuent proportionnellement à une augmentation de l’inflammation.”
Références :
[1] Michael Deyhle, Amanda Gier, Kaitlyn Evans, Dennis Eggett, W. Bradley Nelson, Allen Parcell, Robert Hyldahl. Skeletal Muscle Inflammation Following Repeated Bouts of Lengthening Contractions in Humans. Frontiers in Physiology, 2016.