Si vous aviez besoin d’être secoué pour vous faire sortir de votre canapé et aller mettre vos baskets voici un argument de taille : le manque d’activité physique tue environ autant de gens que le tabagisme. C’est le message pour le moins stupéfiant auquel sont arrivés tout un ensemble d’articles scientifiques publiés sur l’impact de la sédentarité sur la santé.
Les articles, publiés dans The Lancet, suggèrent que plus de 5,3 millions de décès auraient pu être évités chaque année si toutes les personnes qui sont inactives faisaient de l’exercice, un coût en vies humaines pratiquement identique à celui des 5 millions de morts annuels causés par le tabac.
Ces décès pourraient être évités si les gens inactifs faisaient au moins 150 minutes (ou plus) d’exercice modéré par semaine, comme de la marche par exemple.
“Nous avons essayé d’estimer combien de décès auraient pu être évités si tous les gens inactifs dans le monde devenaient actifs” explique I-Min Lee de la Harvard Medical School, dans l’un des articles plubliés [1]
Lee a analysé les données depuis 2008 sur les décès provenant des quatre maladies les plus importantes qui sont associées au manque de sport : les maladies cardiovasculaires, le diabète de type 2, le cancer de l’intestin et le cancer du sein. Son équipe a associé les données sur ces décès avec des informations sur le niveau d’exercice dans chaque pays.
A partir de la, ils ont calculé si chacun atteignait ses objectifs d’exercice hebdomadaire, environ 6% de ceux qui sont globalement décédés de crises cardiaques auraient survécu, tout comme 7% de ceux décédés de diabète de type 2, et 10% de ceux morts de cancer du sein ou du colon.
Pandémie de sport
Harold Kohl de l’Université du Texas déclare que leurs chiffres signifient que l’inactivité physique a créé une “pandémie” contemporaine, apportée par la mécanisation des emplois de tous les jours et de la vie domestique, la libération des transports et la prévalence de la recherche des plaisirs sédentaires, tels que l’ordinateur, les jeux vidéos ou la télévision.
“Étant donné que les populations ont glissé vers l’industrialisation, la mécanisation et la dépendance vis-à-vis des véhicules, nous avons transformé les opportunités de faire de l’activité physique en machines et les avons évacuées hors de nos vies, et de ce fait nous nous condamnons nous-mêmes” explique l’auteur d’un autre article publié dans The Lancet [2] qui argumente en faveur d’une action globale afin d’inverser la situation actuelle.
Dans un autre article scientifique [3], Pedro Hallal de l’Université de Pelotas au Brésil a découvert que globalement 42% des adultes passaient plus de quatre heures assis, et les deux tiers des adolescents passaient deux heures par jour à regarder la télévision sans se lever.
Hallal déclare que la situation ne devrait pas condamner le manque de motivation des gens, mais plutôt la création d’environnements dans lesquels il est impossible, ou pas simple, de se déplacer et de faire de l’exercice, de marcher ou de faire du vélo.
Obligés de marcher
Plus de 100 villes en Amérique du Sud ont réussi à lutter contre ce problème avec des projets qui ont régulièrement fermé des routes à la circulation. Appelé Cyclovie, le mouvement a débuté il y a environ 30 ans à Bogota en Colombie. “Sur 75 jours de l’année, 100 kilomètres de rues de la ville sont fermés au trafic” dit Gregory Heath de l’Université du Tennessee, qui a évalué les interventions [4] dans le monde qui marchaient le mieux pour aider les gens à reprendre une activité physique.
Heath affirme qu’au moins un million d’individus ont pu profiter de Cyclovie rien qu’à Bogota, en permettant de garder actifs les visiteurs pendant une moyenne de 140 à 180 minutes par semaine, et de permettre qu’environ 14% de la population du pays remplisse son objectif d’exercice hebdomadaire.
L’étude de Heath a aussi révélé que les podomètres, qui mesurent le nombre de pas que fait une personne par jour, sont des outils très efficaces pour ce qui est de motiver les gens à marcher et à faire plus de sport. “Ils fournissent un retour d’information, ainsi les gens peuvent voir ce qu’ils ont fait et établir leurs objectifs” dit-il.
Déception olympique
Malheureusement, même si les Jeux Olympiques sont proches, ils sont peu susceptibles de pousser les gens à faire plus de sport.
“Les sports Olympiques sont une chose élitiste et célèbre, branchée sur l’orgueil national, mais pas sur l’activité physique de tous les jours” dit Adrian Bauman de l’Université de Sydney et auteur d’un article qui explore ce qui fait que certaines personnes font du sport et d’autres non [5]. Sa recherche a aussi montré que les Jeux Olympiques de Sydney en 2000 n’ont eu aucun impact sur les niveaux d’activité physique en Australie [6]. “Les sports d’élite ne sont pas une façon très efficace de faire diminuer cette pandémie d’inactivité physique” dit-il.
L’une des réponses, ajoute-t-il, serait que les écoles se focalisent moins à vouloir produire des athlètes gagnants, mais plus à amorcer les élèves afin qu’ils poursuivent les activités physiques qu’ils peuvent aimer durant le reste de leur vie.
Références :
[1] Effect of physical inactivity on major non-communicable diseases worldwide : an analysis of burden of disease and life expectancy. The Lancet.
[2] The pandemic of physical inactivity : global action for public health. The Lancet.
[3] Global physical activity levels : surveillance progress, pitfalls, and prospects . The Lancet.
[4] Evidence-based intervention in physical activity : lessons from around the world. The Lancet.
[5] Correlates of physical activity : why are some people physically active and others not ? The Lancet.
[6] http://sirc.ca/sportcanada/april08/…