Il y a le système aérobique et anaérobique sans oublier la phosphocréatine.

Quand on s’intéresse un tant soit peu à l’utilisation de l’énergie durant l’exercice physique, on pense habituellement aux deux types différents de production d’énergie : aérobique et anaérobique. Le type aérobique est ce qui domine pour les efforts longs et de faible intensité, quand votre coeur et vos poumons sont capables de garder le rythme en termes de demande d’oxygène de la part des muscles.

L’anaérobique prend le relais pour les efforts courts et de forte intensité, et nous l’associons souvent au lactate qui est un produit dérivé (tout comme un carburant) dans les réactions qui produisent de l’adénosine triphosphate (ATP) sans oxygène.

Mais il existe aussi un troisième composant, ou plutôt une autre subdivision de l’énergie anaérobique qui n’a rien à voir avec le lactate (i.e. qui est à la fois “alactique” et “anaérobique”) : la phosphocréatine. C’est fondamentalement le système énergétique “immédiat” du corps : les muscles ont un petit stock d’approvisionnement en phosphocréatine qui peut être décomposé pour produire de l’énergie immédiate.

C’est la source dominante d’énergie pour les sprints courts “à fond” ou pour soulever des objets lourds ; mais une fois qu’elle est épuisée (sur une durée de l’ordre de 10 secondes), elle ne reviendra pas tant qu’on n’aura pas renouvelé le stock (pendant le repos ou un exercice physique de faible intensité). Cela signifie que cette source d’énergie n’est pas disponible pendant une activité physique d’endurance et longue, mais qu’elle joue un rôle dans les courses de moyenne distance (demi-fond).

Une étude, publiée dans l’European Journal of Applied Physiology [1], a analysé des courses de natation de 200 mètres (qui, pour des athlètes de haut niveau, durent un temps moyen de 1,52 minute, comparables à une course à pieds sur 800 mètres). Étant donné qu’il est très difficile et très invasif de mesurer directement la phosphocréatine (car il faut faire des biopsies), l’objectif de l’étude était de comparer deux méthodes d’estimation indirecte de la quantité d’énergie délivrée par ce système.

L’une était de faire simplement certaines hypothèses sur la quantité de phosphocréatine stockée dans les muscles, de la quantité utilisée par chaque muscle pendant l’épreuve de natation, et de supposer que les nageurs avaient épuisé toute la phosphocréatine de leurs muscles pendant la course.

L’autre était de mesurer la dette d’oxygène des nageurs après qu’ils aient fini la course, l’hypothèse dans ce cas est que tout le souffle exhalé immédiatement après un sprint difficile est concentré sur la première priorité du corps qui est de renouveler ses stocks de phosphocréatine ; après seulement que cela soit fait il évacue le lactate, etc.

Voici un graphique qui montre la consommation d’oxygène avant, pendant et après une course de 200 mètres de natation à fond (mesurée avec un astucieux tuba “de faible résistance hydrodynamique” et un analyseur de gaz portable) :


Sur le côté droit du graphique on peut voir la consommation d’oxygène qui décline graduellement. Les chercheurs ont ajusté les données via une fonction exponentielle en deux parties : il y a le composant “rapide” (la ligne en tirets), dont ils supposent qu’elle correspond à l’énergie qui a été utilisée pour réapprovisionner en phosphocréatine, et le composant “lent” (la ligne en pointillés), qui intervient pour éliminer le lactate etc.

Résultats : les deux méthodes produisent des estimations plutôt similaires d’environ 32 kJ. En comparaison, on estime que le système d’énergie anaérobique lactique contribue pour environ 43 kJ, et la contribution aérobique est d’environ 211 kJ. Ainsi, le système de phosphocréatine contribue pour environ 12% de l’énergie nécessaire pour une course à fond de 2 minutes, ce qui est une bonne raison pour s’assurer qu’il ne soit pas totalement épuisé par des sprints trop nombreux immédiatement avant que la course commence. Mais la contribution manifestement la plus importante, même pour une course si courte, est toujours aérobique. C’est pourquoi l’endurance tue…

Références :

[1] Anaerobic alactic energy assessment in middle distance swimming. Eur J Appl Physiol. 2013. Sousa A, Figueiredo P, Zamparo P, Vilas-Boas JP, Fernandes RJ.

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