Les programmes dits « d’entrainement cérébral » peuvent stimuler la mémoire et les capacités de concentration ou de réflexion chez les adultes âgés, mais une recherche de l’Université de Sydney montre que de nombreux programmes sont en fait inefficaces.
Cette étude a été publiée dans le journal PLoS Medicine [1] et elle montre que les adultes les plus âgés qui se lancent dans ce genre d’entrainement cognitif informatisé (que les vendeurs nomment « entrainement cérébral ») peuvent améliorer la mémoire, la rapidité et les aptitudes visuo-spatiales.
Cependant, ils n’ont aucun impact sur l’attention ni sur les fonctions exécutives telles que le contrôle des impulsions, l’organisation et la résolution des problèmes. La dégradation du cerveau et l’altération cognitive sont parmi les plus grandes peurs chez les personnes âgées. La démence constituera sans doute le problème de plus de 100 millions de personnes dans le monde d’ici 2050, et le fait de trouver un moyen de réduire son incidence est d’une importance capitale.
La démence fait référence au déclin cognitif progressif du fonctionnement mental d’un individu jusqu’au point où il ne peut plus réaliser les tâches quotidiennes les plus basiques. Des éléments de preuve prometteurs indiquent que le fait d’exécuter régulièrement des tâches mentales peut aider à maintenir l’état cognitif et à ralentir le risque de démence.
En réaction à ces éléments de preuve scientifiques, une industrie lucrative, qui prétend « exercer le cerveau », s’est rapidement développée, afin de faire face et apaiser les craintes des seniors issus du baby-boom qui entrent progressivement dans l’âge de la retraite, et qui sont avides de commencer des activités leur permettant de protéger leurs cerveaux.
La présente recherche du Groupe de Neuroscience Régénérative de l’Institut de Recherche sur le Cerveau et l’Esprit a révélé que le fait de réaliser un entrainement cérébral en groupe sous la supervision d’un spécialiste est efficace pour ce qui est d’améliorer la performance pour une large gamme de compétences cognitives chez les adultes âgés en bonne santé.
En revanche, les entrainements cérébraux réalisés soi-même à la maison n’ont aucun effet thérapeutique sur la cognition. « Nos résultats envoient un message essentiel au public », explique l’auteur de la recherche le Professeur Michael Valenzuela. « Ils montrent que l’entrainement cérébral réalisé dans un centre peut améliorer la cognition chez les adultes âgés, mais que les produits commerciaux vendus pour être réalisés en solo à la maison ne marchent pas. Il y a des manières plus efficaces de dépenser son argent et de perdre son temps. »
L’équipe de recherche a combiné les résultats de 51 études cliniques randomisées, comprenant presque 5000 participants, par le biais d’une méta-analyse. « Il s’agit d’un très grand nombre d’études cliniques et les résultats étaient concluants », explique Valenzuela. « Nous savons maintenant comment prescrire un entrainement cérébral sur la base des standards les plus élevés en matière de preuve médicale. »
L’une des parties de cette prescription est la fréquence de l’entrainement qui a été identifiée comme étant un facteur important. L’un des chercheurs déclare : « le fait de s’entrainer de une à trois fois par semaine était efficace, mais s’entrainer plus neutralisait ces effets bénéfiques. Les mécanismes de plasticité du cerveau peuvent saturer si l’entrainement est trop fréquent. Tout comme un exercice physique épuisant, nous recommandons au moins un jour de repos entre les séances d’entrainement. »
Le scientifique précise qu’il est important de mettre ces résultats en perspective : « des gains modestes sont à attendre. Ce n’est pas une solution magique ni une panacée, et nous ne savons toujours pas si ce type d’activité peut empêcher ou retarder la démence. Il faut plus de recherche pour le savoir », dit-il.
Les faits
L’entrainement cérébral (informatisé ou via les jeux et applications) est une procédure visant à améliorer la mémoire et les aptitudes de réflexion en pratiquant des exercices mentalement exigeants sur ordinateur.
La cause la plus fréquente de démence est la maladie d’Alzheimer. Elle peut toucher la mémoire, la réflexion, l’orientation, la compréhension, les capacités de calcul et d’apprentissage, le langage et le jugement.
La démence touchera plus de 100 millions de personnes à travers le monde.
Les facteurs de risque de la démence comprennent l’hypertension, le diabète, les maladies cardiovasculaires, le tabagisme, la dépression, l’inactivité physique et l’obésité.
La démence deviendra la troisième plus grande cause de dépenses de santé dans les 20 ans à venir.
Doper son cerveau – réalité ou intox ? Alain Lieury.
Références :
[1] Computerized Cognitive Training in Cognitively Healthy Older Adults : A Systematic Review and Meta-Analysis of Effect Modifiers. Amit Lampit, Harry Hallock, Michael Valenzuela. PLoS Medicine.