L’apport supplémentaire d’oxygène, l’entraînement en hyperoxie, gagne en popularité, mais rien ne prouve que la technique rende ceux qui s’y adonnent plus rapides pour autant.

Quant on parle de moduler ses apports en oxygène pendant un entraînement sportif, on pense habituellement à s’entraîner en altitude comme le font les Kényans, ce qui force le corps à s’adapter en utilisant moins d’oxygène, ainsi devient-il plus efficace avec la quantité d’oxygène qu’il reçoit.

Mais on entend de plus en plus parler d’entraînement “hyperoxique” ou en hyperoxie, ce qui signifie que le sportif porte un masque pour recevoir des niveaux d’oxygène plus élevés que la normale pendant sa séance d’entraînement, ce qui (en théorie) permettrait d’aller plus vite et plus dur avant que la fatigue ne le frappe.

Est-ce que ça marche ? L’entraînement hyperoxique a été étudié il y a de cela plusieurs décennies [1]. Et comme les résultats de l’étude de Bannister le montrent, le fait d’inspirer plus d’oxygène vous permet d’aller plus loin et plus vite que vous seriez autrement capable de faire. Par exemple, pendant un test sur tapis de course à 10 km/h et à 14% d’inclinaison, Bannister a atteint l’échec après 8,45 minutes quand il respirait avec des niveaux normaux d’oxygène (à 21%), et avec 66% d’oxygène il courait deux fois plus loin sans défaillir.

La vraie question, cependant, est de savoir si faire ce genre d’entraînement permet à un athlète de courir plus vite une fois le masque retiré, étant donné que ce genre d’équipement est interdit et qu’on ne va se pas se balader toute la journée avec un masque sur le visage ! Il y a plusieurs études qui ont laissé entendre que ce pourrait bien être le cas, mais aucune étude d’une qualité irréprochable, ni rigoureusement contrôlée, n’a pu démontrer que s’entrainer de la sorte apportait des bénéfices de la performance sportive.

L’autre problème est d’ordre pratique. C’est bien beau de s’entraîner sur un vélo stationnaire ou un tapis de course, mais il ne s’agit ni l’un ni l’autre de conditions d’entraînement dans des environnements optimaux. C’est la question posée par une étude de chercheurs Australiens [2] qui ont fait réaliser un entraînement par intervalles à des coureurs (10 x 3 mn à 85% de leur Vo2max, suivi d’une minute trente de repos à chaque fois), en leur faisant respirer un air constitué à 99,5% d’oxygène pendant la période de repos plutôt que pendant qu’ils couraient.

Comme ils s’y attendaient, le niveau de saturation en oxygène dans le sang a récupéré plus rapidement dans le groupe qui avait reçu de l’oxygène que dans le groupe normal (la saturation en oxygène peut chuter à 8-13% pendant des entraînements intensifs par intervalles). Mais cela ne se traduit pas nécessairement par de meilleurs résultats. Plus précisément, cette étude a essayé de savoir si l’oxygène réduirait les niveaux d’inflammation et de stress oxydatif après un entraînement sportif. Voici ce qu’ils ont trouvé concernant l’interleukine-6, qui est un marqueur relatif de la réaction inflammatoire :


Il n’y a pas de différences significatives entre le groupe qui respirait 21% d’oxygène (NORM) et celui à 99% d’oxygène (HYP), la même chose a été observée pour un marqueur du stress oxydatif.

Alors, qu’est-ce que cela permet de conclure à propos de l’entraînement hyperoxique ? Rien de bien concluant. Contrairement à d’autres techniques d’entraînement qui sont purement bidon (comme avec les bracelets équilibres par exemple), l’apport supplémentaire en oxygène produit réellement des effets physiologiques significatifs. La question est maintenant de savoir si c’est un outil d’entraînement utile, et si c’est le cas, comment il devrait être utilisé. Car après tout, courir en pente descendante permet aussi d’aller réellement plus vite avec moins d’efforts, mais ce n’est pas pour autant devenu une technique d’entrainement révolutionnaire.

Références :

[1] The Effects on the respiration and performance during exercise of adding oxygen to the inspired air. R. G. Bannister, D. J. C. Cunningham. J. Physiol., (I954) I25, II8-I37.

[2] Effect of supplemental oxygen on post-exercise inflammatory response and oxidative stress.
White J, Dawson B, Landers G, Croft K, Peeling P. Eur J Appl Physiol. 2012.

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