Usain Bolt, le sprinter triple médaillé olympique de la Jamaïque, avait prédit qu’il battra son propre record de vitesse de 9,69 secondes au 100 mètres, pour toucher les 9,54 secondes. Son entraineur lui a dit que cela pourrait être possible, ainsi le croit-il. En effet, ce dernier a récemment lu une étude de l’Université Duke qui a montré que les sprinter et les nageurs qui sont les plus grands, les plus lourds mais les plus svelte, sont aussi ceux qui cassent les records du monde.

Au premier abord, il peut sembler étrange que les athlètes les plus gros soient les plus rapides. Pourtant, Jordan Charles, un ingénieur de Duke, a fait un tableau de tous les détenteurs de records du monde du 100 mètres course et du 100 mètres natation depuis 1900 contre leur taille, leur poids pour faire une mesure qu’il a nommé la “sveltesse”.

Les champions du monde de sprint ont gagné en moyenne 16,2 cm en taille depuis 1900, tandis que les champions de natation ont pris 11,4 cm, comparés à la moyenne des gains en taille des simples mortels qui est de 4,8 cm.

Dans le même temps, environ 7/10° d’une seconde ont été rasées du sprint des 100 mètres, tandis que plus de 14 secondes ont disparu du record de natation des 100 mètres.

Que se passe-t-il ?

Charles a appliqué la “théorie constructale” qu’il a apprise de son mentor Adrian Bejan, un professeur d’ingénierie mécanique de Duke, qui décrit comment les objets se meuvent dans leur environnement.

“Tout ce qui bouge, ou tout ce qui nage, doit évoluer pour qu’il glisse de plus en plus facilement” dit Bejan. “La nature veut trouver une voie douce, pour nager plus facilement, trouver un chemin vers moins de résistance” dit-il. “Le modèle animal n’y est jamais arrivé, mais il essaye d’être le moins imparfait possible”. Leur étude a été publiée dans le Journal de Biologie Expérimentale [1].

Pour la locomotion, un être humain a besoin de dépasser deux forces : la gravité et la friction. Premièrement, un athlète aura besoin de décoller son pied du terrain ou de garder son corps sur l’eau sans couler. Deuxièmement, la résistance de l’air pour le sprinter, et de l’eau pour le nageur, limiteront sa vitesse.

Ainsi, le premier pas est effectivement de porter son poids, là où un athlète plus gros et plus fort excellera. La seconde étape est de se mouvoir à travers l’espace avec le moins de friction possible, ce qui met l’accent sur le nouveau facteur de la sveltesse.

En comparant la taille avec une “largeur” calculée de l’athlète, la sveltesse est une mesure de la masse répandue sur une certaine longueur. L’athlète qui peut fabriquer plus de masse musculaire sur une charpente aérodynamique aura l’avantage.

Les chiffres

En natation, le légendaire champion Hawaïen Duke Kahanamoku détenait le record du monde en 1912 avec 61,6 secondes avec une sveltesse calculée de 7,88. Quelques 96 années plus tard, Eamon Sullivan a réduit ce record du monde à 47,05 secondes à un facteur de sveltesse de 8,29.

Étant donné que les facteurs de sveltesse des athlètes se sont élevés avec les années, les chronos de sont effondrés.

En 1929, le record du monde de sprint aux 100 mètres d’Eddie Tolan de 10,4 secondes, a été réalisé avec un facteur de sveltesse de 7,61. Quand Usain Bolt a couru les 100 mètres en 9,69 secondes aux J.O. de 2008, son facteur de sveltesse était de 8,29 tout en étant le champion le plus grand de l’histoire à 1,95 mètre.

“La tendance, révélée par notre analyse, suggère que les records de vitesse continueront à être dominés par les athlètes les plus lourds et les plus grands” dit Charles. “Nous croyons que cela est dû aux lois constructale de la locomotion animale, et non pas à l’augmentation contemporaine de la taille moyenne des êtres humains.”

Ainsi ; à quelle vitesse couraient les premiers Olympiens ? Charles a utilisé des découvertes anthropologiques de la masse corporelle des Grecs et Romains de l’époque, et les a insérées dans sa formule.

“Dans l’Antiquité, les poids des corps étaient de 70% de ce qu’ils sont de nos jours” dit-il. “En utilisant notre théorie, un sprint de 100 mètres qui a été gagné en 13 secondes aurait pris environ 14 secondes.”

Bolt a finalement réalisé sa prédiction lors des championnats du monde de Berlin de 2009. En touchant les 9,58 secondes, il a vérifié la théorie.

Références :

[1] The evolution of speed, size and shape in modern athletics. J. Exp. Biol. 2009 212 : 2419-2425

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