Les antioxydants, souvent crédités d’une capacité à protéger les cellules des dégâts qui les rendent cancéreuses, pourraient en fait aider les cellules cancéreuses à survivre, déclare une étude publiée dans Nature [1].

“L’étude était intrigante, mais il reste à voir comment les résultats seront applicables de manière générale” déclare le Dr Harold Seifried de la Division de la Prévention du Cancer à l’Institut National du Cancer de Bethesda.

Des cellules mammaires épithéliales en bonne santé subissent une mort cellulaire programmée quand elles s’égarent de leur environnement cellulaire normal. Les cellules tumorales ont cependant reçu des signaux de survie des oncogènes, qui gardait les cellules en vie quand elles migraient vers différentes régions du corps.

Joan Brugge de l’Université de Harvard et ses collègues ont fait l’hypothèse que les oncogènes supportaient les cellules tumorales en bloquant l’apoptose, mais quand elles empêchaient l’apoptose dans la culture de cellules, les cellules mourraient toujours quand elles étaient transplantées hors d’une matrice extra-cellulaire de support.

En plus de l’apoptose, les chercheurs ont trouvé que ce qui tuait ces cellules était une incapacité à produire du glucose. Quand ils exprimaient un cancer du sein oncogène dans des cellules tumorales détachées, le métabolisme du glucose dans les cellules était restauré, alimentant la production d’ATP. Étonnamment, le fait d’ajouter deux types d’antioxydants empêchait aussi les cellules tumorales de mourir en restaurant la production d’ATP, non pas en augmentant le glucose, mais via une autre voie métabolique appelée l’oxydation des acides gras. “Nous avons obtenu un sauvetage de l’ATP avec des antioxydants” dit Brugge.

Les scientifiques ont obtenu les mêmes résultats dans un système de culture de cellules qui ressemblait davantage à du tissu vivant : bloquer l’apoptose n’était pas assez pour permettre aux cellules tumorales de survivre, mais neutraliser le stress oxydatif avec des antioxydants les gardait en vie. “Les antioxydants que nous avons utilisés étaient capables de restaurer les niveaux normaux d’énergie cellulaire des cellules cancéreuses” dit Zachary Schafer de l’Université Notre Dame d’Indiana, principal auteur de l’étude.

Balz Frei, directeur de l’Institut Linus Pauling de l’Université de l’Oregon, prévient que les résultats sont encore loin de montrer que les antioxydants augmentent réellement la survie des cellules pré cancéreuses ou cancéreuses des organismes vivants.

“Il est important de rester prudent à propos de l’interprétation des résultats de cette étude” dit Frei. Ce dernier se demande d’ailleurs pourquoi les auteurs ont choisi d’utiliser un des antioxydants, le Trolox (une solution hydrosoluble de dérivé de vitamine E), au lieu d’un plus puissant comme la vitamine C.

Tous les antioxydants, traitements ou cellules tumorales, ne sont pas identiques, ajoute Seifried. Dans des recherches futures, “il serait bien d’utiliser différents types de cellules pour tester les résultats à un niveau plus général” dit-il.

Brugge déclare que son groupe a prévu de répéter l’expérience en utilisant différents antioxydants, et sur des tissus vivants. Elle reconnait cependant qu’”il est trop tôt pour extrapoler parce que nous n’avons pas de données in vivo pour l’instant.”

Références :

[1] Antioxidant and oncogene rescue of metabolic defects caused by loss of matrix attachment. Nature.

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