Une étude a exploré la communication entre le muscle et le cerveau au point d’épuisement.

Si vous courrez sur un tapis de course et que vous augmentez la vitesse jusqu’à un niveau difficile, vous devrez éventuellement sauter du tapis ou appuyer sur le bouton d’arrêt d’urgence. Pourquoi cela ?

Qu’est-ce qui détermine avec précision le moment où vous devrez abandonner ? Au premier abord, cela semble être une question hyper évidente, mais elle fait actuellement l’objet de débats. Cela vient-il de ce que les fibres de vos muscles lâchent, ou sont vidées de carburant, ou ne peuvent plus avoir assez d’oxygène ? Ou cela vient-il de ce que votre cerveau décide que vous avez poussé trop fort ? Ou y a-t-il encore un amalgame d’effets plus compliqué ?

Un article publié dans le Journal of Applied Physiology [1] apporte plus de preuves en faveur du rôle de ce qu’on appelle la ” rétroaction afférente”. Fondamentalement, les chercheurs disent que ce ne sont pas vos muscles qui sont mis en défaut en soi, mais plutôt que vos muscles envoient un flux de signaux constant en direction du cerveaupour lui expliquer comment ils fonctionnent. Quand cette information atteint un seuil critique, le cerveau dit “ça suffit !”. Ceci diffère de la théorie du gouverneur central de Tim Noakes, en ceci que le rôle du cerveau est purement réactif : il n’essaye pas de prévoir et évite les problèmes qui surviennent.”

Comment vérifier cette idée ? C’est justement ce que l’étude d’Amann a cherché à faire. L’étude a impliqué des volontaires qui ont fait des extensions avec une jambe constamment sous tension (comme de pédaler avec une seule jambe mais en utilisant que les quadriceps). Les cercles ouverts du graphique ci-dessous montrent l’épuisement perçu quand les volontaires faisaient cet exercice jusqu’à épuisement avec l’une de leurs jambes à une charge donnée, ils pouvaient tenir jusqu’à 10 minutes avant que leur épuisement perçu atteigne 10 sur 10 et qu’ils abandonnent.


Les cercles pleins représentent le même exercice avec la même jambe mais un autre jour ; la différence est que cette fois-ci il a été réalisé immédiatement après avoir fait l’exercice avec l’autre jambe. Ainsi, ils faisaient cet exercice d’une seule jambe avec des muscles frais et pas particulièrement épuisés (le fait d’utiliser un seul muscle fait qu’ils n’ont pas subi l’épuisement sur tout le corps comme quand on courre ou qu’on pédale).

Malgré tout, l’effort qu’ils ont perçu était plus élevé au début, et ils ont abandonné environ 50% plus tôt. Pourquoi cela ? Les chercheurs expliquent que c’est parce que la rétroaction afférente depuis les muscles des deux côtés provient de la même aire du cerveau, ainsi il y a toujours des signaux de douleur qui persistaient venant de l’autre jambe (qui récupère) pendant que l’autre cuisse fait de l’exercice.

Ce point de vue de la rétroaction afférente depuis le muscle jusqu’au cerveau qui joue un rôle dans la fatigue semble éminemment raisonnable et intuitive. Cela dit, les autres explications ne sont pas entièrement éliminées pour autant. Cette étude reconnait brièvement le rôle potentiel que la rétroaction afférente depuis les autres régions du corps, comme du cœur et des poumons, pourrait jouer (le rythme cardiaque au début de la séance du second exercice se situait au-delà des 130 battements par minute par exemple), tout comme le rôle possible de la demande cognitive ; cela exigeait des efforts et de la concentration pour faire de l’exercice jusqu’à épuisement, et de nombreuses études ont montré que ces quantités sont finies et épuisables. Le débat scientifique semble impliquer beaucoup de réflexion “soit / soit”.

Références :

[1] PERIPHERAL FATIGUE LIMITS ENDURANCE EXERCISE VIA A SENSORY FEEDBACK-MEDIATED REDUCTION IN SPINAL MOTONEURONAL OUTPUT. Markus Amann, Massimo Venturelli, Stephen Ives, John McDaniel3, Gwenael Layec, Matthew Jordan Rossman, Russell S. Richardson.

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