Le tamoxifène, produit utilisé contre le cancer du sein, est-il vendu comme complément alimentaire pour le bodybuilding ?

Dans une lettre publiée dans le British Medical Journal [1], il est expliqué que depuis plus de 30 ans les bodybuilders avalent du tamoxifène pour prévenir et traiter la gynécomastie (le gonflement des seins) causée par la prise de stéroïdes anabolisants.

Habituellement, le tamoxifène provient d’un trafic illégal, disent-ils. Cependant, des discussions sur des forums de bodybuilding avaient émis l’hypothèse qu’un complément alimentaire appelé l’Esto Suppress, contenait du tamoxifène parce que l’étiquette rapportait l’un de ses noms chimiques.

C’est ce qui a motivé des chercheurs à acheter quatre échantillons du complément alimentaire à différentes époques situées entre la fin de l’année 2011 et le début de 2012, pour en analyser le contenu. Du tamoxifène a été retrouvé dans trois des quatre échantillons dans différentes concentrations (3,8 mg, 0,9 mg et 3 mg).

L’étiquette du produit recommandait un dosage de deux capsules par jour, ce qui, dans le cas du premier échantillon, pourrait avoir apporté 7,6 mg de tamoxifène (10-20 mg est utilisé cliniquement pour traiter les gynécomasties).

On ne sait pas si l’Esto Suppress qui est actuellement vendu contient toujours du tamoxifène, mais depuis les années 2000, un nombre de plus en plus important d’”aliments”, de “plantes” ou de compléments “alimentaires” vendus en magasins ou sur internet – qui ciblent un public composé d’adeptes des salles de musculation, ou de tous ceux qui veulent perdre du poids voire accroitre leurs capacités sexuelles – contiennent des substances pharmacologiquement actives, expliquent les auteurs.

Ceux-ci comprennent des stéroïdes anabolisants, des érectogènes (pour stimuler l’érection), des stimulants, des coupe-faim et des anxiolytiques (pour traiter l’anxiété).Souvent, les substances ne sont pas reprises sur les étiquettes, et les produits pourraient être étiquetés comme “naturels” en exploitant la croyance qu’ils constituent des options sans danger et bonnes pour la santé. Dans d’autres cas, comme dans celui susnommé d’Esto Supress, seule une mention obscure est faite à propos de la substance, en mettant simplement le nom chimique.

Les chercheurs mettent en garde en disant que la plupart des utilisateurs “ne seront pas conscients qu’ils prennent ces substances”, et pressent les professionnels de la santé de demander à leurs patients d’évoquer leur utilisation de “suppléments” et de rapporter tout effet secondaire.

Références :

[1] Is the breast cancer drug tamoxifen being sold as a bodybuilding dietary supplement ? Michael Evans-Brown, Andreas Kimergård, Jim McVeigh, Martin Chandler, Simon Brandt. BMJ, 2014 ; 348:g1476. 2014.

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